Jeux Olympiques et politique.
Posté par bricabraque le 16 novembre 2007
Jesse Owen triomphe lors des JO de Berlin et ridiculise les théories hitlériennes.
L’exceptionnelle couverture médiatique des JO, leur universalité, font de ces derniers une cible parfaite afin d’assurer un écho maximal à toute action, notamment politique :
- Hitler entend se servir des JO, organisés à Berlin en 1936, comme outils de propagande. La prétendue supériorité de la « race aryenne » devrait donc être confirmée par les performances des athlètes allemands. Les 4 médailles d’or remportées par Jesse Owen, athlète noir américain, ridiculisent au contraire les théories racistes du führer qui quitte la tribune d’honneur dépité et refuse de serrer la main du vainqueur.
- En 1968, à Mexico, les deux sprinters américains Tommie Smith et John Carlos protestent contre la ségrégation raciale qui continue de sévir aux EU. Lors de la remise des médailles, ils brandissent le poing ganté de noir, tête baissée, à la manière du Black Power. L’image fait le tour du monde et souligne le rôle primordial que joue désormais la télévision.
Tommie Smith et John Carlos protestent contre la situation raciale dans leur pays.
- Lors des Jeux de Munich, le 5 septembre 1972, en pleine nuit, un commando de terroristes palestiniens, le groupe Septembre noir, pénètrent dans le village olympique et prend en otage les membres de l’équipe israélienne. Ils réclament la libération de 200 Palestiniens, emprisonnés en Israël. Cette prise d’otages se solde par un massacre (11 morts Israéliens, 5 terroristes et un policier allemand) et souligne l’incompétence du service de sécurité et de la police allemande, complètement dépassés par les événements.
* Autre moyen de protester ou de dénoncer une situation politique contestée, le boycott :
- L’Union soviétique ne participe que très tardivement aux JO (première participation à Helsinki en 1952), préférant organiser ses propres épreuves sportives dans le cadre des Spartakiades.
- dans le contexte de la guerre froide, les deux Grands n’hésitent pas à boycotter les JO, si ils se tiennent dans le camp adverse. Ainsi en 1980, afin de protester contre l’invasion soviétique en Afghanistan, le président Carter refuse la participation des EU aux Jeux organisés à Moscou. Une soixante d’autre pays du bloc de l’ouest refusent aussi de se rendre en URSS, ce qui décrédibilise en grande partie la compétition.
Quatre ans plus tard, c’est au tour des Soviétiques et d’une quinzaine de pays socialistes de boycotter les Jeux de Los Angeles (la Chine envoie en revanche des athlètes).
Commando palestinien « Septembre noir », en 1972, à Munich.
* Le boycott constitue une autre forme de protestation :
- après un événement marquant: l’Egypte, le Liban et l’Irak boudent les JO de Melbourne,en 1956, afin de dénoncer l’occupation franco-britannique du canal de Suez. L’Espagne franquiste, la Suisse renoncent aux jeux pour protester contre la répression soviétique en Hongrie.
* L’organisation des JO offre une visibilité internationale exceptionnelle et permet au pays d’accueil de se mettre en valeur : l’Allemagne nazie entend utiliser les Jeux comme une vitrine du régime ; l’URSS espérait beaucoup de la réception des Jeux en 1980 sur son territoire, le boycott occidental l’affecte ainsi particulièrement.
Affiche anarchiste hostile aux JO de Moscou.
* Dans un contexte de rivalités exacerbées, la compétition sportive devient parfois très rude. Ainsi, au cours de la guerre froide, la suprématie sportive devient un enjeu très important, car elle est susceptible d’illustrer la supériorité d’un modèle.
Le décompte des médailles dépasse donc la simple compétition sportive (les Soviétiques triomphent en 1956, 1960, 1972, 1976, 1988 ; les Américains occupent la première place en 1964 et 1968).
Les épreuves sportives opposant directement les deux Grands constituent ainsi des moments forts. En 1972, à Munich, l’équipe de basket soviétique met un terme à l’invincibilité américaine dans la discipline qui durait depuis 1936. Dépité et en colère contre l’arbitrage, les Américains refusent la médaille d’argent.
Victoire américaine sur les Soviétiques lors des JO d’hiver de Lake Placid en 1980
Les résultats des deux Allemagne sont également observés avec une attention particulière (en 1972, à Munich,
la RDA devance le frère ennemi sur son propre territoire ; RDA=20, RFA=13). Pour le régime castriste, les succès des sportifs cubains prouvent l’efficacité de sa politique éducative et sanitaire.
En 1952, la Yougoslavie de Tito l’emporte 3 à 1 face à l’ombrageux « grand frère » soviétique lors d’un match de football, preuve de la supériorité du titisme sur le stalinisme pour les Yougoslaves.
Afin de distancer l’adversaire, le recours au dopage n’est pas exclu (de lourds soupçons pèsent sur les nageuses est-allemandes par exemple dont la carrure laisse perplexe ; les athlètes chinois).
A Helsinki, en 1952, la construction de deux villages olympiques distincts pour les membres des deux blocs est l’illustration de la bipolarisation du monde.
Trois ans après la chute du mur de Berlin, les Jeux de Barcelone, en 1992, apparaissent comme ceux de la réconciliation internationale: une seule équipe allemande, la réintégration de l’Afrique du sud.
* La participation d’une nation revêt parfois une grande importance symbolique. Israël participe pour la première fois aux épreuves en 1952. Le CIO, avant l’ONU, reconnaît la Chine populaire qui envoie une délégation d’athlètes à Helsinki (1952), ce qui provoque aussitôt le retrait de Taiwan (la Chine de Mao ne participe pas aux Jeux suivants par choix idéologique).
Avec la décolonisation, les pays africains font leur entrée dans le mouvement olympique lors des JO de Rome en 1960.
Les athlètes palestiniens défilent derrière leur drapeau à Athènes en 2004.
* L’exclusion des Jeux, au contraire, stigmatise un Etat jugé indigne de participer à ce moment théoriquement fédérateur. L’Allemagne et le Japon sont absents des Jeux de Londres en 1948 après le conflit mondial. A Tokyo, en 1964, le CIO exclut l’Afrique du sud à cause de l’apartheid (lors des jeux de 1968, 1972 et 1976 de nombreux pays africains boycottent les JO pour protester contre l’apartheid).
* Si le sport peut être en avance sur la géopolitique, il ne faut pas exagérer ce phénomène. Contrairement aux espoirs de beaucoup, les JO organisés en Corée du sud en 1988 ne permettent pas la présentation d’une seule équipe coréenne, réunissant Coréens du nord et du sud. Le Nicaragua, Cuba, l’Ethiopie et la Corée du nord boudent ainsi ces jeux.
De la même manière, les protestations de reporters sans frontières, qui dénoncent les atteintes aux droits de l’Homme, n’empêchent pas le choix de la Chine comme pays d’accueil des Jeux en 2008.
Affiche de reporters sans frontières dénonçant les violations des droits de l’homme en Chine.
Reste que, comme le disaient les sociologues, Norbert Elias et Eric Dunning, « les Jeux olympiques permettent aux représentants des différentes nations de s’affronter sans s’entre-tuer. »
Liens:
- Un article de la revue regards sur l’est: « les guerres olympiques de l’URSS« .
- Un TPE original sur « l’olympisme« .
- La principale source de ce post: un article de Pascal Boniface, paru dans le Monde diplomatique.
- Les riches archives de Radio Canada avec de courts extraits videos ou audios: « Regards sur les JO« .
- Le site officiel du Comité International Olympique.
- Un point sur le film de Spielberg (Munich) consacré à la traque du groupe septembre noir après la tuerie de Munich, en 1972.
- Un bel article d’élèves de Terminale sur le blog de M. Tribouilloy.
- Jeux olympiques et guerre froide sur le blog de Louis Brun.
merci a toip our les img
Tres bonne description, Bon site..
Bravo